Texte critique: Rolande Delanou -Langlois

Rolande Delanou -Langlois, le monde à travers le filtre.

La peinture n’est–elle pas l’art cosmétique par excellence et par essence, celui où l’artifice exerce sa séduction dans la plus grande autonomie à l’égard du réel et de la nature ?…Si on enlève les couches de peinture dont le peintre s’est servi pour représenter les formes sur un tableau, il ne reste rien, que la blancheur nue de la toile écrit l’historienne d’art Jacqueline Lichtenstein, dans son ouvrage intitulé, La couleur éloquente.

La peinture serait alors la cosmétique de l’âme. Sans les ruses de cette matière colorée, l’âme resterait invisible.
Ainsi, derrière chaque œuvre d’art il y a une sensibilité à l’œuvre utilisant les fards de sa secrète pharmacie.

Les paysages et les nus de Rolande Delanou-Langlois semblent ainsi conçus. Le fard en est discret. Les lignes gommées, les contours vaporeux brouillant la visibilité de l’ensemble. Une douceur féminine et discrète, un monde pastel, rêvassé, embué où le mouvement est rond comme les tourbillons du vent.

Les couleurs déploient leurs nuances à travers une palette évoquant l’effet de la rouille sur les feuilles des arbres au mois de septembre, tel le charme des rousses. Le jaune donne une lumière chaleureuse, les rouges sont estompés, les blancs sont froids. Les bleus crayeux, irréels et électriques laissant apparaître comme dans une vision fantastique, une femme aux allures de déesse, la Mater Lucina .

Les paysages abstrait de Rolande Delanoue-Langlois semblent être d’une tout autre nature. L’artiste explore la couleur délayée, la texture liquide pour obtenir des images évoquant des phénomènes naturels. Valée du Tarn apparaît quasiment comme une photographie prise du ciel. Mais dans Tsunami les couleurs sont boueuses et grises formant une masse glissante, une atmosphère cataclysmique. Geysers en est une autre.

Le liquide amniotique qui protège le fœtus dans Nativité et la Marée rouge et noire c’est de la même nature cosmique n’est pas ?
Le microcosme rejoint le macrocosme, les femmes en possèdent viscéralement les secrets.

Une symbolique sourde semble se développer dans les toiles de Rolande Delanoue Langlois, surtout dans les œuvres où le corps dénudé de la femme est évoqué.

Il n’est pas représenté simplement pour lui-même, ni uniquement pour ses rondeurs sensuelles. Il semble évoquer un sens secret et mythologique.

Cosmos veut dire l’ordre. Comme l’ordre que la femme entreprend sur son visage se maquillant. Comme la peinture qui matérialise les velléités de l’âme a se rendre sensible, à créer, s’incarnant dans une œuvre d’art.

Rolande Delanoue-Langlois modèle aussi la terre : Rêverie est une jolie pièce aux dimensions agréables, évoquant une barque égyptienne et le mystère du Nil.
L’artiste maîtrise surtout la taille de la pierre. Des corps tout en rondeur sortent de la masse amorphe de la matière, Michel-Ange disait : J’ai vu un ange dans le marbre et j’ai seulement ciselé jusqu’à le libérer.

Ileana Cornea, Paris juin 2013